Crise au Soudan :

Depuis avril 2023, le Soudan est le théâtre de violents conflits opposant l'armée soudanaise aux Forces de Soutien Rapide (FSR), un groupe paramilitaire. La lutte de pouvoirs entre les deux généraux aux commandes du Soudan depuis le putsch de 2021 a dégénéré en "l'une des pires situations humanitaires au monde" selon l'Organisation Internationale pour la Migration. Claudine Mayer, responsable médicale pour Médecin Sans Frontière (France) au Soudan, était dans Déclic pour nous décrire la situation.

Iran Press/Le Monde: Selon les Nation Unies, le Soudan connaît "une des plus grandes crises de déplacement au monde". C'est plus de 25 % de la population soudanaise qui s'est vue contrainte d'être relocalisée dans des conditions souvent précaires. En effet, sur les 47 millions d'habitants du Soudan, plus de 11 millions ont fui les régions du Soudan touchées par les combats et 2 millions se sont réfugiés dans les pays voisins. Si beaucoup ont pu trouver refuge chez des proches, la majorité se contente d'abris de fortune, de tentes, ou encore dans des écoles ou des camps de réfugiés.

Dans tous ces cas, les conditions d'accès aux services de base sont très difficiles, notamment les sanitaires. Les maladies comme le choléra et le paludisme circulent plus facilement dans ces conditions, et "la saison des pluies a déjà commencé. Donc ça ne peut, ça ne peut que s'aggraver", ajoute Claudine Mayer.

De plus, près de la moitié de la population est en situation de crise alimentaire aiguë, selon l'IPC, l'Agence de classification de la sécurité alimentaire. La crise a engendré un grand manque de ressources : nourriture, eau, carburant et matériel médical. Depuis le début des conflits, 11 hôpitaux ont été la cible d'attaques, rien que dans la ville d'El Fasher. Le 11 août, le dernier hôpital public fonctionnel de la ville a subi une de ces attaques, endommageant les services essentiels de chirurgie et de maternité. Pour la responsable médicale de Médecin Sans Frontières, ceci "démontre de façon assez flagrante que les belligérants ne respectent pas la protection des établissements sanitaires". 

Des négociations pour un cessez-le-feu sont en cours depuis le 14 août à Genève. Même si la situation politique ne paraît pas s'apaiser, la question de l'accès humanitaire sur les zones de conflit semble avancer. 

Claudine Mayer rappelait la condition indispensable pour venir en aide aux populations civiles : "Nous, ce que nous souhaitons en premier lieu, c'est une amélioration importante de l'accès humanitaire, que ça soit pour pouvoir traverser les frontières, mais également pour pouvoir traverser les lignes de front. Et ceci à la fois pour les médicaments, le matériel médical, mais aussi le personnel médical. Actuellement, le blocage de cet approvisionnement fait que nous sommes complètement étranglés dans nos projets et que nous risquons de devoir bientôt fermer des activités. Ensuite nous souhaitons bien sûr que la protection des civils, des soignants et des structures sanitaires soit respectée tel que c'est exigé par le droit humanitaire international".

Jeudi, le Conseil souverain du Soudan a annoncé la réouverture aux convois humanitaires du point de passage frontalier d’Adré, pour une durée de trois mois. L'ouverture de cet accès stratégique situé entre le Tchad et le Darfour soudanais est aussi une sorte de stratégie politique. Cette zone est majoritairement contrôlée par le FSR, et est soupçonnée d'être leur point de passage pour leur approvisionnement en armes, qui serait alors compliqué par la présence internationale. 

 

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